En apparence figée dans une tradition séculaire, la bière opère en toute discrétion une révolution. Entre nouvelles technologies, ouverture au local et prise de conscience écologique, elle est en passe de changer radicalement de visage. Et elle le doit en grande partie aux indépendants.
Le monde de la fine mousse tourne de plus en plus vite. C’est un fait établi. Depuis quelques années, de nouveaux acteurs ont émergé, à l’instar du groupe BrewDog qui a réussi en peu de temps à bousculer un univers coincé entre les géants industriels et les apôtres d’une tradition monacale. La firme écossaise a su tirer son épingle du jeu en misant sur un marketing à toute épreuve basé sur un esprit rebelle et un branding pertinent qui sait toucher un public rajeuni. Mais ce n’est pas tout. BrewDog a également réussi à déployer tout un écosystème autour de son activité principal en ouvrant dans le monde entier des boutiques spécialisées, des bars thématiques et, le fin du fin, des hôtels à la gloire de ses productions. La société BrewDog a été créée en 2007 par James Watt et Martin Dickie dans le Nord-Est de l’Ecosse et s’est aujourd’hui agrandie de quatre brasseries et de 100 bars dans le monde entier. Les revenus de 2019 atteignant les 300 millions de dollars, la marque BrewDog est estimé à près de 2 milliards de dollars.
Les indépendants vers le DTC
A l’image de la jeune équipe d’Aquae Maltae à Aix-en-Provence, de nombreux brasseurs indépendants ont décidé de se tourner vers le grand public plutôt que d’essayer de signer un accord avec un distributeur national. Enjeu de visibilité comme de rentabilité, la technique fonctionne pour ceux qui savent déployer les outils numériques idoines. En Angleterre, Beavertown a opéré une bascule aussi rapide que déterminante. Fondée en 2011, la société londonienne est passée d’une stratégie dédiée aux pubs et restaurants à une vente directe lorsque le coronavirus a frappé. Son site, initialement destiné à quelques transactions d’appoint est devenu sa base opérationnelle avec un chiffre d’affaire qui a bondi de plus de 1000% en quelques jours seulement.
Une bière algorithmique
On n’arrête pas le progrès, diront certains habitués du café du coin. Mais il n’empêche que la prouesse réalisée par IntelligentX a de quoi étonner. Le service a tout simplement réussi à mettre au point la toute première bière brassée par une intelligence artificielle. Pour ce faire, elle utilise un simple robot déployé sur Facebook Messenger pour adapter la recette de base aux goûts et demandes des consommateurs. L’algorithme employé dans l’opération dispose d’un système d’apprentissage lui permettant de repérer les tendances et d’adapter la méthode de brassage en conséquence. Le procédé tourne autour d’un test de quatre bières de base par des consommateurs. Quatre bières disposant d’un code imprimé qui est associé à une courte série de questions. Par la suite, les données sont implantées dans le fameux algorithme, et sont utilisées lors du prochain brassage. En tout, le produit a déjà été modifié onze fois, en fonction des retours d’expérience.
De nouveaux acteurs populaires
Les microbrasseries, nouveau leader en devenir ? C’est tout à fait possible. Après la crise du coronavirus, les consommateurs se sont largement tournés vers de la vente directe et des systèmes de DTC. Les premiers à avoir su répondre à l’appel sont les microbrasseurs eux-mêmes. Depuis quelques années, ils s’établissent dans toute la France et ont réussi à tisser un réseau opérationnel. En tête des régions d’accueil, le Rhône-Alpes connaît la plus forte densité de microbrasseries : 83 établissements. Leader mondial du secteur, la Suisse compte près de 500 établissements sur son territoire. En Belgique, le rapport de force tend à s’équilibrer entre les grands exploitants et les structures plus modestes. Nombre de citoyens belges voient dans l’essor de cette offre alternative un retour aux sources. Jusqu’à la fin du XIXe siècle, le plat pays comptait davantage de brasseurs que d’églises. Des brasseurs qui, à l’époque, innovaient en révolutionnant les étapes de fermentation. Un esprit que reprennent aujourd’hui les microbrasseries.
- Depuis quelques années, la bière se renouvelle et mue
- Des indépendants changent la donne et innovent
- l'algorithme entre en jeu et rebat les cartes de la conception de bière
- le DTC devient une base opérationnelle pour les indépendants
jeremy felkowski
Journaliste, entrepreneurs des médias et touche-à-tout insatiable, Jérémy Felkowski a fondé "Le Zéphyr", un bi-média déployé sur le web et sur papier qui explore l'actualité au travers des aventures humaines. Un projet qui permet à sa rédaction de donner corps à une ligne éditoriale curieuse, exigeante et humaniste. Il accompagne également créateurs de médias dans la définition de leur concept, de leur communication et de leur networking. A partir de 2015, cet engagement s'est matérialisé par un événement dédié aux jeunes pousses de l'information qu'il porte avec Le Zéphyr, en parallèle de ses missions de coaching. "Le Printemps des médias" rassemble chaque année à Paris une centaine de créatifs, de journalistes et d'esprits curieux autour de problématiques centrales du monde médiatique. Mais au-delà des rencontres et du pilotage de projets, il partage désormais son expertise avec les étudiant.e.s d'écoles de journalisme et de communication tels que l'IICP, l'ISG, l'EFAP et les établissements du groupe ESG.